Wwoof autour du monde

C'est l'histoire d'une journaliste qui va se nettoyer les neurones durant un an en faisant du wwoofing autour du monde.

Pour ceux qui ne connaissent pas, wwoofing: willing workers on organic farms, c'est-à-dire aider des agriculteurs bio et en échange être logé et nourri.

Pourquoi du wwoofing? Parce qu'il combine tout ce que j'aime: la nature, le grand air - ah, les mains dans la terre, finir sa journée crottée - les voyages, les rencontres... Et surtout, je n'avais pas envie de "voyager pour voyager", mais trouver un fil conducteur et apporter ma petite contribution à une autre façon d'envisager notre monde.

Attention! Ce n'est pas un travail journalistique que je fais ici, je ne prétends pas à l'exactitude, mais au partage de ce que je vis. Pour le plaisir, simplement...

jeudi 20 août 2015

Detroit, histoire d'une décadence

Du wwoofing à Detroit ?  En pleine ville ? Et oui ! « Motor City » la ville où étaient jadis fabriquées pratiquement toutes les voitures circulant sur les routes américaines est aujourd’hui une ville où l’on trouve de nombreuses fermes.

Explication : jusque dans les années 50 – 60, Detroit était la cinquième plus grande ville des USA, une des plus riches également. Mais elle avait fait une grosse erreur : mettre tous ses œufs dans le même panier, et ne vivre que de l’industrie automobile.

Cette industrie avait besoin d’ouvriers, et nombre d’Afro-Américains sont venus à Detroit. Du fait des tensions raciales, à partir des années 60, les blancs – en général plus aisés -  ont commencé à quitter la ville. La crise du pétrole est arrivée là-dessus, ainsi que la montée de l’automatisation, d’où les pertes d’emploi, et la ville a commencé à  se paupériser et à entamer sa longue décadence.



Et encore, ces images ne reflètent qu'une partie de la réalité. J''étais là pour wwoofer, pas pour faire un reportage photo. Sur le net, vous pouvez trouver des photos impressionnantes, en particulier de la gare,  magnifique bâtiment en ruine.
Crime, violence, drogue, Detroit est devenue une des villes les plus dangereuses des USA ; les gens ne pouvant plus payer leur logement (ah, que de choses on pourrait écrire sur les établissements de crédit qui promettent monts et merveilles de la consommation  et plongent les gens dans le surendettement…), ils ont été expulsés. Et à Detroit, c’était en masse !  L’hémorragie démographique était telle qu’en quelques décennies, la ville est passée de 1,8 millions d’habitants à 700 000 aujourd’hui…

Banqueroute

Qui dit moins d'habitant dit moins de taxes locales qui rentrent pour la ville, alors que la taille des réseaux à entretenir et alimenter (eau, électricité, transports, etc) restait la même. Et la population restant étant pauvre, les problèmes étaient multipliés. La crise de 2008 n'a été que la goutte d'eau qui a fait déborder le vase; les transports publics sont quasi-inexistants désormais, l'éclairage public fonctionne à moitié, il n'y a plus de trains, la gare est en ruines... Le seul moyen pour la Ville de s'en sortir, était de se déclarer officiellement en banqueroute, en 2013, afin d'éliminer ses créances. Detroit est la plus grande ville américaine à s'être mise en banqueroute; elle est désormais gérée par un mandataire financier.


Partout, on trouve ces maisons abandonnées, parfois seules, parfois une ligne entière, parfois voisines de maisons en parfait état.
Quant aux maisons abandonnées par milliers, elles ont été détruites, du coup la nature a repris ses droits, l’herbe a poussé. Au cours des années 2000, des habitants ont décidé d’utiliser ces espaces vides pour y faire de l’agriculture, et c’est ainsi que Detroit est devenue un haut-lieu de l’agriculture urbaine, avec toute une réflexion sur la ville de demain… et que j’ai donc décidé de venir wwoofer ici.

Grand écart permanent


Detroit, c’est aujourd’hui ce constant grand écart : des rues en déliquescence, des magasins aux vitrines fermées de bardeaux couverts de graffitis, des maisons abandonnées, où soit les plantes  poussent partout, soit elles ont brulé et ne restent plus que des moignons noircis. Souvent, une maison abandonnée cotoie une maison habitée et toute proprette. Puis  on arrive à un adorable quartier avec ses maisons de brique style campagne anglaise, des pelouses en parfait état, des parcs… C’est assez surréaliste…

En résumant, Detroit aujourd’hui, c’est 1) un downtown en parfait état (il a relativement peu souffert, et par ailleurs la Ville l’a pas mal vendu aux investisseurs, qui le retapent, mais bien  sûr on se doute qu’ils ne font pas cela par charité ; les loyers montent en flèche, les anciens habitants sont donc obligés de partir pour laisser la place à des gens plus « acceptables »…) ; cet ilôt de richesse et de business  est entouré par 2) la ville en ruine, peuplée majoritairement par des Afro-Américains, puis plus on s’éloigne et plus on retrouve 3) de jolies quartiers propres, ou bien les fermes, créées majoritairement par des blancs.

Bref, on se doute que rien n’est simple…




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