Wwoof autour du monde

C'est l'histoire d'une journaliste qui va se nettoyer les neurones durant un an en faisant du wwoofing autour du monde.

Pour ceux qui ne connaissent pas, wwoofing: willing workers on organic farms, c'est-à-dire aider des agriculteurs bio et en échange être logé et nourri.

Pourquoi du wwoofing? Parce qu'il combine tout ce que j'aime: la nature, le grand air - ah, les mains dans la terre, finir sa journée crottée - les voyages, les rencontres... Et surtout, je n'avais pas envie de "voyager pour voyager", mais trouver un fil conducteur et apporter ma petite contribution à une autre façon d'envisager notre monde.

Attention! Ce n'est pas un travail journalistique que je fais ici, je ne prétends pas à l'exactitude, mais au partage de ce que je vis. Pour le plaisir, simplement...

dimanche 28 juin 2015

Hauts et bas dans la vie d'un poulailler



Eh bien voilà, j’avais écrit un article tout joyeux intitulé « Les poulets découvrent la liberté », mais je n’avais pas encore eu le temps de le poster. Et les aléas de la vie dans une ferme m’ont rattrapée : en deux jours, 200 poulets sont morts, en raison d’une frénésie de picage entre les poules et eux. Cela a été deux dures journées.

Je vais donc les raconter en deux temps ; le joyeux, que j’avais déjà écrit, et le moins joyeux. Et en photo il n’y a pas grand-chose, parce que des poulets morts ou blessés, bof, et de toute façon dans ces moments-là on a des choses plus urgentes à faire que de photographier. 

Episode 1 « Les poulets découvrent la liberté »


Mercredi matin, après une météo couci-couça, c’était la première journée de grand et franc soleil. Du coup, les poulets ont eu droit à leur première journée dehors au grand air. On a ouvert grand les portes de la grange et ils sont restés plantés comme des idiots dans leur grange. « Ouh, là-bas je ne connais pas, on sait jamais, c’est dangereux… » Finalement,  les humains, nous ne sommes pas tellement différents des poulets…

Bref, on a eu beau essayer de les pousser dehors -  gentiment, hein, sinon ils se grimpent les uns sur les autres tellement ils ont la trouille – à peine on menait une rangée vers l’extérieur que les autres refluaient dedans. A la fin de la journée, quelques petites dizaines d’aventuriers s’étaient bien risqués dehors et se doraient au soleil, mais pour les 2865 autres, l’idée n’était toujours parvenue jusqu’à leur cervelle.
Tentative d'Alexandre de faire sortir les poulets. Le lendemain, il faudra au contraire les persuader de rentrer le soir. Quand on a pris goût à la liberté, hein...




Jeudi matin, rebelote, la volaille de nouveau glougloutant avec incertitude devant la liberté qui s’offrait à elle. On les a eus par la faim : rien dans les mangeoires intérieures, n’avaient qu’à se bouger le croupion pour aller picorer celles de l’extérieur. 
 En revanche, une fois qu’ils ont pris goût à la liberté, alors là… Virée chez  les cochons, chez les humains, chez les poules ; celles-ci ont assez peu apprécié et leur ont fait savoir à coup de becs bien sentis.
Vendredi soir, il a fallu batailler pour cette fois les inciter à rentrer , et samedi, les garçons ont été réquisitionnés pour consolider les grillages.
C’était la production franco-québecoise « Les poulets découvrent la liberté ».

Episode 2 « Le monde sans pitié d’un poulailler »


Samedi, tandis que Lucie, Christian et moi étions au marché de Melbourne, les autres ont donc été chargés de consolider les clôtures. Mais c’était déjà trop tard : les poulets avaient été carrément attaqués par les poules (le système hiérarchique est très dur dans un poulailler, les nouveaux sont des intrus et les autres les martyrisent presque pour montrer leur dominiation) et avaient des blessures béantes au croupion. Et quand un poulet a une blessure comme cela, les autres l’attaquent. D’abord parce qu’un congénère blessé risque d’attirer un prédateur, le vieil instinct leur dicte donc de le tuer ; par ailleurs,  les volailles sont omnivores, la blessure sur l’autre, c’est du sang et de la viande fraiche ; on ajoute à cela le stress de l’attaque par les poules, les poulets ont donc dévoré les blessés de l’intérieur.

Cela a été une hécatombe : samedi, plus de 150 poulets morts, ou qu’Alexandre, Robin, Bradley et Evan ont dû achever. La party prévue samedi soir autour d’un feu chez Lucie a été annulée parce qu’on n’avait plus le cœur à ça. Dimanche, nous avons ramassé encore une trentaine de cadavres. Samedi soir et dimanche, nous avons soigné les blessés dans "l'hôpital", un lieu isolé des autres dans le poulailler: bleu de métylène pour désinfecter, et spray à l’aluminium pour isoler la plaie.   


Les blessés sont isolés dans "l'hôpital".
Allez, autant trouver de l’humour dans tout cela, hein ? Nos blessés se sont retrouvés avec un postérieur argenté, très classe.  Des croupions d'argent, un petit air de poule de luxe, en somme…

Demain, j'essaierai de  voir si je ne peux pas les prendre en photo; mais là, c'est trop tard, les croupions d'argent dorment.

jeudi 25 juin 2015

Au quotidien




Chez Lucie, une journée de wwoofer démarre vers 8 h 30 (mais l'horaire est très souple) et peut représenter, au choix, nourrir les 3000 poulets, les huit cochons (Dorothée, Arnold le verrat, les porcelets...); chercher les œufs, les nettoyer pour qu’ils soient bien propres à l’achat ; désherber, planter le potager avec entre autres une quantité de piments : thai dragon, jalapeno, sweet chili, etc…. – c’est fou ce qu’on aime ici les sauces chili ou de même sorte !

Cela peut être aussi fabriquer un abri en bois ou une nouvelle boite aux lettres – la précédente a fait une rencontre nocturne fortuite avec un automobiliste – faire et étendre les 400 000 lessives de huit personnes dont les vêtements se salissent à la vitesse grand V, laver la chienne Maia qui s’est roulée dans le fumier, participer à la cuisine, la vaisselle, etc, etc… 

La participation aux tâches quotidiennes de la maisonnée n'est pas une obligation (dans certaines fermes, les wwoofers ne le font pas), mais ici elle relève pour tous de l'évidence: on se sent comme chez soi, donc on donne tous un coup de main!




 

mercredi 24 juin 2015

La Saint-Jean, fête nationale







Aujourd’hui on a célébré le 24 juin, la fête nationale du Québec, la Saint-Jean-Baptiste. Un jour très important pour les Québecois, car ils tiennent farouchement à leur différence par rapport au Canada. Vue de chez nous, cette différence peut parfois paraître anecdotique, un peu folklorique, même, mais les années de lutte âpre pour l’indépendance ne sont pas si loin…  La fête nationale du Canada, elle, se célèbre d’ailleurs le 1er juillet ; au Québec, on l’appelle « le jour du déménagement » car les baux de location se terminent traditionnellement à cette date-là, et du coup  beaucoup de gens profitent de ce jour férié pour déménager. D’une pierre deux coups, et une façon de garder le titre de « fête nationale » à la Saint-Jean.

Les drapeaux bleu et blanc avec la fleur de lys fleurissent sur les balcons, les t-shirts,  les voitures, et durant toute la journée, la radio joue uniquement des artistes québecois. Pareil  hier pour la veillée avec feu d’artifice à Cookshire, le jeune groupe de rock n’a joué que des artistes de la Belle Province. Re-belote à la fête du 24, à Saint-François-Xavier de Brompton, ce ne sont que des airs québecois, cette fois plus traditionnels, avec accordéon, violon, chacun peut y pousser la chansonnette, et danser les danses en rang, gigues ou autres. Certes, l’âge moyen des danseurs est d’environ 65 ans, mais bon, on n’est pas à une rave party, hein ?


La raison pour laquelle nous sommes allés fêter la Saint-Jean à Saint-François (c’est joli, non ?), c’est parce que Raymond, le « chum » (copain) de Lucie, y anime des stands pour les enfants. Pour les enfants, mais pas que : j’y retrouve  un grand classique des fêtes en Amérique du Nord, le test de force avec le maillet. Avouons que la performance de la représentante de la France ne restera pas dans les annales… Quand je pense qu’avant moi une jeune fille a tapé sur la machine avec une force qui a fait grimper le poids plus qu’à la moitié… Il me faudra encore quelques semaines d’entrainement des muscles grâce au wwoofing pour arriver à son niveau.




Bien sûr, à une fête on mange et on boit. L’occasion pour moi de découvrir une des spécialités du Québec, la poutine : frites, fromage frais  caoutchouteux – « plus il fait skouik skouik quand tu le manges, meilleur il est » (skouik skouik, c'est d'ailleurs son nom quand on l'achète) - et sauce brune, et une petite bière pour faire passer ça. Je n’ai pas osé me lancer dans  la bière Clamato, c'est-à-dire au jus de légumes et jus de palourde. Jus de palourde ????  Il faudra que j’y goûte un jour, j’adore découvrir des saveurs inconnues, mais la présence de bière à la myrtille – pardon, au bleuet (rire de Lucie : « au Québec, on mange des bleuets, il n’y a que les Schtroumpfs qui mangent des myrtilles ») - me donne une bonne excuse pour repousser l’échéance…

D’ailleurs, j’ai quand même eu le plaisir de goûter de nouveau à la rootbeer (la racinette pour les Québecois). Ah, la rootbeer, un mythe, un truc qu’on ne doit trouver qu’en Amérique du nord. Pour avoir une idée du goût, pensez à un médicament et ajoutez-y des bulles, vous aurez la rootbeer.

Et puis, ce n’est pas parce qu’on est en été qu’on doit se priver de la tire ! La tire, c’est du sirop d’érable qu’on verse sur de la neige, et qu’on entoure ensuite autour d’un bâtonnet pour la déguster. Sur plusieurs mètres, les organisateurs ont étalé une bande de neige et on peut se servir à volonté. C’est marrant, mais là je ne me suis pas fait prier pour y goûter…








samedi 20 juin 2015

Bienvenue chez Lucie!




Merci à Diana ! C’est principalement le commentaire de cette wwoofeuse qui m‘a donné envie de commencer mon tour du monde chez Lucie Durocher – nom officiel, « la Ferme paysanne RDF, des poulets tout en nature et aussi des petits cochons » - à Cookshire, au Québec. Et franchement, je ne le regrette pas… Chez Lucie, on se sent bien, tout simplement BIEN.

Ceux qui me connaissent savent combien je peux parfois (parfois souvent…) être stressée comme une pile électrique, eh bien sitôt arrivée chez Lucie, pouf ! le stress s’est envolé, loin, très loin… C’est comme si j’étais, comment dire, chez moi. Comme le dit Bradley, un jeune qu’elle héberge, « chez Lucie, c’est magique. »

C’est sûr, les adeptes des lieux bien rangés feraient une drôle de tête en arrivant ici, car on est dans une joyeuse ménagerie : trois garçons – Guillaume (parti avec une bande de potes et de chiens faire la saison des cerises en Colombie britannique), Alexandre, Christian – plus Bradley donc, trois chiens, quatre chats, et les wwoofers au nombre variable, tout cela se bouscule dans la bonne humeur dans la maison.

Côté wwoofers, nous sommes quatre actuellement : Robin, de Colombie britannique, qui wwoofe depuis plusieurs mois car il a envie d’avoir un jour sa propre ferme, Evan et Harper, de Rhode Island - elle étudiante en neurologie, lui en anthropologie - et c’est leur première expérience de wwoofing, et moi bien sûr.

Pour le moment, notre travail a consisté principalement à désherber le potager. En effet, à cause de pluies intenses, les plantations ont pris trois semaines de retard, du coup seuls l’ail et l’oignon sont en terre, il faut urgemment préparer le reste. J’ai déjà attrapé mon premier coup de soleil, au bas du dos : quand on est penché sur la terre, difficile de garder le t-shirt et le pantalon collés l’un à l’autre… Nous avons aussi fait deux marchés – la saison commence – dont l’un aujourd’hui à Melbourne. Melbourne Québec, comme Paris, Texas. D’ailleurs, il y a Strasburg (sans « o ») sur la côte Est des Etats-Unis, dans le pays Amish.

Très sympa en tout cas le marché de Melbourne, l’occasion de papoter à droite et à gauche, c’est incroyable comme les gens sont chaleureux, ouverts. Pour s’amuser, les Québecois disent parfois que les Français parlent avec la bouche en cul-de-poule, avec un accent pincé ( ici, c’est nous qui avons un accent, pas eux), et quand je vois les Québecois, je me dis qu’il n’y a pas que l’accent qui est pincé chez nous !!
Bref, pour le moment,mon tour du monde ne pouvait pas mieux débuter...

Séance musculation pour les garçons avec le van embourbé. Désolée, je n'ai pas encore eu le temps de prendre des photos...


 Lucie et Robin payent de leur personne...