Au risque de me répéter, ce voyage me permet de toucher du
doigt combien j’ai de la chance d’être née en France, un pays riche, avec tout
le confort que l’on peut avoir. A El Yunque, j’ai vécu la vie des employés de
la finca. Et encore, j’ai vécu mieux qu’eux : j’avais une douche et non le
classique baril d’eau de pluie où l’on puise avec une écuelle.
Au cours de mes voyages, j’ai dormi dans des lieux très
sommaires, mais je crois que cela n’a jamais été aussi dur qu’à El
Yunque . Le voyage pour y aller
relevait, lui, de l’aventure des
transports locaux comme je l’aime : trois heures pour faire 40 kilomètres
sur une route boueuse et tortueuse à grimper de 800 à 1200 mètres ; le bus
devait parfois s’arrêter pour mettre des chaines et les gens ont dû à un moment
creuser des tranchées pour détourner l’eau (nous sommes en saison des pluies). Le
tout suivi de deux heures de marche (avec le sac dos de 16 kilos) sur un chemin boueux, dans
la nuit et très vite sous la pluie. Mais ceux qui me connaissent se douteront que cette petite aventure ne m'a pas déplu.
Sauvée par deux paréos
Mais l’arrivée, elle, a été dure : lorsque Carlos, le
mandador (le contremaître) m’a amenée à ma cabane, j’ai vu une cabane délabrée,
et surtout un matelas taché et sentant
le moisi. J’ai failli fondre en larmes.
Heureusement j’avais un sac à viande et surtout deux paréos. Les
paréos sont un de mes équipements de base dans mes voyages en pays chaud ;
ils servent à tout : paréos bien sûr, serviette de toilette plus agréables
et efficaces que les microfibres, serviettes de bain, drap du dessus lorsque
ceux-ci sont absents, et drap du dessous quand on a un doute sur la literie ;
si je ne les avais pas eus, je repartais d’El Yunque dès le lendemain. J’accepte à peu près tout en termes de
conditions de vie sommaire, mais un matelas sale, là, j’avoue que je ne peux
pas… Bref, sans ces paréos, l'un en drap et l'autre en serviette de toilette, je n’aurais
jamais connu ces deux semaines d’une grande richesse humaine.
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Le matelas que j'ai découvert en arrivant. je me suis dit "non, je ne pourrai jamais..." Merci à mon paréo!! |
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Mon "chez moi". |
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La douche alimentée à l'eau de pluie. Un privilège de volontaire. Ici, les gens utilisent le traditionnel barril d'eau de pluie o ils puisent avec un bol. |
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Les barils récupèrent l'eau de pluie pour la douche et pour le point d'eau. |
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Home sweet home. |
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Les toilettes sèches, avec de la sciure. Un autre privilège de volontaire. A la campagne, les toilettes sont un trou entouré de quatre piquets tenant une bâche en plastique noire ou, pour les plus chanceux, une cabane en ferraille installée par le CRS, le catholic relief service. |
J’ai ensuite passé la nuit à rajouter des couches de
vêtements: nous sommes sous les tropiques, mais El Yunque est à 1200 m, et nous
sommes en saison des pluies. Les nuits sont très froides, je n’avais qu’un
sac à viande pour pays chauds. Le
lendemain, j’ai vu sur le lit supérieur une couverture ; elle sentait le
moisi à trois kilomètres, mais tant pis, c’était une couverture et elle m’éviterait
de mourir de froid chaque nuit !
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On a beau essayer, tout reste humide durant la saison des pluies. ici, la pochette de mon compact au bout de quinze jours. |
Pour couronner le tout, je n’avais vu que trop tard, déjà
dans le bus, le message du propriétaire, Miguel, me disant qu’il ne serait pas
à la finca. Or, le lendemain, premier jour de ma présence à El Yunque, c’était
dimanche ; je me suis donc retrouvée totalement seule dans la finca, à me demander ce
que je faisais là. La douche hors service, le point d’eau avec trois malheureuses
gouttes, le petit réchaud de la cabane
hors service lui aussi, les habitants de San Antonio de Upa, le village à côté,
distants avec moi, les gamins de dix ans avec leur habituel côté bravache et
provoquant sur la « gringa », « I love you », etc, etc… J’apprendrai
plus tard que les derniers volontaires à être venus n’étaient restés qu’un
jour, après avoir vu l’état des matelas. Pour les habitants, je n’étais donc
que la prochaine sur la liste des fuyards.
Et en plus, totalement coupée du monde: il n'y a pas d'électricité (hormis une petite éolienne pour alimenter le chargeur de batteries des téléphones, ainsi que de mon appareil photo et mon ordinateur), et donc pas de connexion internet. Pour téléphoner, il faut grimper sur la colline, mais l'opérateur que j'avais ne fonctionnait pas ici. Ce dimanche, je me suis sentie vraiment très seule...
Mais le lundi, quand j’ai commencé mon travail et que j’ai
rencontré les ouvriers de la finca, j’ai vite vu que les conditions de vie qui
me faisaient dresser les cheveux sur la tête étaient pour eux des conditions de
vie normales, c’était donc à moi de les
accepter. Je les ai acceptées.
Ro la vache... la bête hein pas la bouse !!! Autant je te connais mais toi qui me connais... tu te doutes que je n'aurais pas tenu 3 minutes !!!
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