Comment se passaient donc
nos journées chez pinaan Jim ? Etant en pleine saison sèche – c’est peu de
le dire, le jardin était complètement grillé -, il y avait peu de travail
agricole, une bonne part de nos tâches a été de l’entretien : couper les
bambous (je sais maintenant tout sur la façon de couper les bambous !)
destinés à construire un abri pour les coqs – tous les gallinacés ici sont des
races de coqs de combat, et les perdants sont ceux qui passeront à la casserole
– faire des pare-feu dans la forêt, nettoyer et réparer, construire un muret
pour la cuisine, etc…
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Corvée de bois pour Julien et Tim. |
Et puis aussi chercher l’herbe à buffles dans de grands paniers de
bambou pour les deux buffles de la ferme. Une herbe qui porte bien son
nom : ils l’aiment tellement que le soir, quand on va chercher la
bufflonne, elle vous pousse de la tête pour que vous le détachiez plus vite –
ce qui en général ralentit le processus, mais allez expliquer cela à une
bufflonne affamée… - puis galope vers l’enclos et la succulente herbe qui
l’attend. Il y a aussi le cochon, sympathique comme tout, qui adore qu’on le
gratouille ; et deux jeunes matous roux et câlins, mascottes des
volontaires.
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Récolte de l'herbe aux buffles avec Esther. |
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Le jour où le cochon a réussi à s'échapper de son enclos pour faire un tour dans la cuisine. |
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Nos mascottes. |
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Et encore nos mascottes. |
Nos journées commençaient à 6 h 30, avec la médiation du matin,
moment de silence et de recueillement débutant par des exercices
d’assouplissement. Il est un mouvement d’art martial que pinaan Jim nous a
appris, tout en esthétique fluide et en puissance lorsqu’il nous en faisait la
démonstration, fascinant à voir, et si frustrant lorsque nous tentions
maladroitement de le reproduire.
Les étirements étaient suivis de la marche méditative vers le
temple où nous allions faire des exercices de yoga et méditer. Bon, là, j’avoue
que la marche méditative, bof… Car celle-ci se faisait sur la route, et mon
esprit occidental reprenait le dessus en imaginant combien nous devions
paraître ridicules à marcher à la queue leu leu tête baissée et mains croisées
dans le dos quand des automobilistes ou des motocyclistes nous croisaient. Eh
oui, le chemin vers la sagesse et le détachement du regard des autres est
encore long…
Heureusement notre honneur occidental est sauf, il n’existe aucune
photo de ces moments, car, malgré tout, ils conservent un aspect sacré et
me/nous prendre en photo durant les séances de méditation aurait été comme un
sacrilège. Mais j’aurais tellement aimé vivre plus souvent la marche que nous
avons faite le dernier jour de ma présence, dans la forêt, pour méditer au
milieu des arbres… Pas de crainte du ridicule, seul le plaisir d’être dans la
nature, un temple en soi…
Les repas étaient eux aussi des moments particuliers. Déjà par
leur qualité gustative : grâce à pinaan Lak, un des aides de pinaan Jim,
j’ai mangé à HHH la meilleure nourriture thai que j’ai jamais mangée !
Toutes sortes de légumes et de plantes que nous découvrions – fleur de banane,
jeunes feuilles de manguier, herbe de fer (bon, celle-là, nos palais
occidentaux ont eu du mal avec son amertume, presque tout est allé dans l’auge
du cochon), et tant d’autres, vous savez, « la survie en forêt »,
savoir utiliser chacune de ses ressources… Sans compter la citronnelle et la
coriandre pour lesquelles je me damnerais…
Ah les soupes de potiron, les coqs mitonnés – les perdants du
combat de l’après-midi -, les bok choy (sorte de chou), les patates douces, les
saveurs si variées, si fines, le riz collant à la mangue, et même les moules de
vase, délicieuses grillées avec du sésame et de la sauce de soja…
Le repas lui-même était un rituel : chaque groupe de plats
(un groupe pour quatre ou cinq convives) représentait une montagne autour du
plat de riz collant, une feuille de bananier accueillant les fruits et les
plantes à grignoter crues. La distribution du riz collant – nourriture sacrée
d’après pinaan Jim – donnait lieu elle aussi à un rituel particulier, une
grosse boule de riz passée de main en main avec respect jusqu’à sa montagne. A
nous ensuite de prendre un morceau de riz avec notre main droite (la main pure)
et de le rouler pour le manger, comme en Inde ou en Afrique. C’est toujours
dans ces moments-là que je regrette d’être gauchère…
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Préparation des montagnes par Tom et Carolina. |
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Une montagne, dominée par son plat de riz collant. |
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Découverte de plantes inconnues aus saveurs inconnues. |
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Offrande du riz collant par Tom. |
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Bon appétit! |
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