Wwoof autour du monde

C'est l'histoire d'une journaliste qui va se nettoyer les neurones durant un an en faisant du wwoofing autour du monde.

Pour ceux qui ne connaissent pas, wwoofing: willing workers on organic farms, c'est-à-dire aider des agriculteurs bio et en échange être logé et nourri.

Pourquoi du wwoofing? Parce qu'il combine tout ce que j'aime: la nature, le grand air - ah, les mains dans la terre, finir sa journée crottée - les voyages, les rencontres... Et surtout, je n'avais pas envie de "voyager pour voyager", mais trouver un fil conducteur et apporter ma petite contribution à une autre façon d'envisager notre monde.

Attention! Ce n'est pas un travail journalistique que je fais ici, je ne prétends pas à l'exactitude, mais au partage de ce que je vis. Pour le plaisir, simplement...

vendredi 25 décembre 2015

Chez Nikki et Hamish et leurs 3000 moutons (2)

J'ai donc passé dix jours dans la ferme d'élevage de moutons de Nikki et Hamish. Et mon rôle à moi, quel est-il? Et bien, il est tout petit, mais Hamish m’a garanti qu’il leur fait gagner du temps : ouvrir et fermer les portails, aider à séparer les troupeaux et les rabattre dans le hangar, me planter au milieu du chemin pour les empêcher de prendre la tangente, aider à pousser les bêtes quand on les vermifuge et éviter qu’une ne file avant d’avoir d’avoir eu sa gorgée de produit…

Petit rôle, mais rôle tout de même: j'immobilise les moutons pour qu'Hamish puisse les vermifuger puis je les retourne comme une crêpe pour qu'ils repartent vers l'enclos.


Car je me suis inquiétée sur mon utilité ; autant pour le maraîchage je voyais clairement le besoin car la main-d’œuvre y est importante pour désherber, planter semer ; mais quand il s’agit d’animaux, le travail est beaucoup plus organisé et précis. Hamish m’a donc rassurée : « Si les brebis sont tranquilles, les agneaux, eux, sont imprévisibles. Si certains se mettent en tête de ne pas suivre le chemin, parfois même avec les chiens ce n’est pas toujours facile. Une personne de plus, ce n’est pas du luxe. »

Le dernier jour, j’ai eu l’honneur de les vermifuger, beaucoup moins facile que cela n'y paraît !  Car ces agneaux de cinq mois font entre 35 et 50 kg, et gigotent dans tous les sens. Hamish m’a aussi laissé les vacciner : une piqûre dans le gras sous l’oreille..

Bien sûr, on pense tous aussi à la tonte… J’y ai participé un jour, chez un jeune voisin ; c’est en fait sa compagne qui s’occupait de la ferme, mais elle a été tuée il y a quatre mois, écrasée par un ballot de laine…  La vie de ferme, c’est cela aussi, les dangers d‘un métier dur.

La tonte à laquelle j’ai participé était un peu particulière… Le premier jour, quand Hamish m’a parlé de leur tondre le derrière, j’ai cru qu’il voulait me faire marcher. Mais non, on leur tond effectivement le postérieur pour éviter que les crottes ne s’accrochent à la laine. Non pas pour faire beau, on s’en doute, mais pour éviter les infections. 


Le tondeur porte des chaussons de cuir pour éviter de glisser sur le plancher en bois.


La technique pour traîner le mouton sans qu'il ne bouge; j'ai testé, et au bout d'une vingtaine d'agneaux de 30 à 50 kg à attraper et traîner, j'avais la langue jusque par terre... 


J’ai donc ramassé la laine tondue, et je me suis essayée à amener les moutons vers le tondeur : il faut arriver à les renverser pour qu’ils soient assis par terre et on les traîne par les pattes avant jusqu'à la plateforme de tonte; les bestiaux que j’ai eu à traîner faisaient dans les 50 kg, au bout d’une dizaine j’avais une langue jusque par terre… Je comprends pourquoi les éleveurs ont des carrures de bûcherons… Une fois tond, le bestiau est poussé vers une rampe où il glisse vers la liberté retrouvée.

J’ai aussi eu à porter les agneaux blessés ou en mauvais état qu’Hamish devait ensuite achever en les égorgeant; les soigner serait trop coûteux en argent et en temps, et les laisser impliquerait une mort lente dans les prés. Les attraper est un travail étonnement facile car l’agneau, une fois saisi et maintenu au sol par les chiens, fait le mort ; il suffit pour moi de le cueillir. 

J'ai à cette occasion appris que dans les abattoirs de Nouvelle-Zélande, les bêtes sont assommées avec une sorte pistolet automatique puis égorgées selon le rite halal. Explication d'Hamish: "Cela facilite les choses pour les exportations; on n'a pas besoin ainsi de séparer les stocks selon le pays de destination."

Qu’est-ce que j’ai fait encore ? Ah oui, j’ai tondu la pelouse afin qu’elle soit belle pour Noël, et j’ai arraché les chardons dans les prés, véritable plaie. Visiblement, quand les colons écossais sont venus avec leurs moutons, ils n’ont pas remarqué que leur laine trimballait quelques passagers clandestins. Et ceux-ci se sont fort bien adaptés au sol néo-zélandais…

Avec Lucy, Tewy, Moose et Boots, quatre amours de chiens.





mercredi 23 décembre 2015

Chez Nikki, Hamish et leurs 3000 moutons (1)

Bien sûr, quand on décide de wwoofer en Nouvelle-Zélande, on rêve d’une chose : travailler dans une ferme de moutons ; ne pas le faire serait un peu comme un touriste qui vient à Paris et ne va pas voir la Tour Eiffel. C’est donc chez Nikki et Hamish, dans la région de Gore, tout au sud de l’île du sud, que j’ai découvert la vie dans une ferme ovine.




Un couple adorable, lui est né dans cette ferme créée par son grand-père à son retour de la Seconde Guerre mondiale, elle est vétérinaire, canadienne de l’Ontario, et a rencontré Hamish à l’occasion d’un séjour « vacances travail » en Nouvelle-Zélande. Hamish, c’est un grand gars aux boucles et à la barbe rousses qui marquent ses origines écossaises (et françaises également, apparemment), un costaud à la carrure de joueur de rugby, qu’il a joué jusqu’à récemment, et une crème. Avec Nikki, nous échangeons sur nos impressions respectives d’être dans un pays « à l’autre bout du monde », nous rions, nous papotons. Ils ont deux puces mimi comme tout, Lucie, 4 ans, et Billie, 2 ans, et numéro 3 devrait arriver début janvier. S’ajoute à cela Puss, une splendide et imposante chatte à l’incroyable fourrure et à la queue comme un immense plumeau qui ondule avec nonchalance.

Hamish, Lucy, Billie et Nikki, mon adorable famille d'accueil durant dix jours.


Haimish amène un des agneaux pour le peser.


La bestiole est coincée automatiquement entre ces deux mâchoires pour être pesée sans bouger.




Et, donc… Il y a leurs 3000 moutons et quelques vaches, sur 300 hectares, ce qui fait une ferme de taille moyenne ; certaines ont 10 ou 20 000 moutons. Au moment où j’y étais, il s’agissait de sevrer les agneaux nés en septembre de leurs mères, et de les vermifuger.  J’ai accompagné Hamish et son père ; celui-ci vient tous les jours car le processus de transmission entre père et fils est toujours en cours.  La ferme, c’est cinquante ans de sa vie, « j’en connais chaque centimètre », sourit-il.

Le quad, idéal pour parcourir les immenses prés.


Pour ramener chaque troupeau jusqu’à la ferme, Hamish est en 4X4, son père sur un quad, et il y a Tewy, Lucy, Moose et Boots, les quatre chiens, qui font un sacré travail, et tout le monde rabat les masses bêlantes jusqu'à leur destination. Une fois dans le hangar, chacun passe par un étroit passage et au bout, le père de Hamish manœuvre des portails : une brebis ? Portail du milieu. Un agneau de belle taille ? Portail de droite. Un plus petit ? Portail de gauche. Ainsi, de nouveaux troupeaux seront formés.

Prêts pour être sélectionné suivant la taille.


Les agneaux sont ensuite vermifugés ; ils repassent dans l’étroit passage, où ils se retrouvent coincés comme des rats, grimpant l’un sur l’autre, et nous venons derrière, leur mettons dans le gosier une giclée de vermifuges et les relâchons. Le spectacle est passionnant à voir de bout en bout. Déjà, avec les chiens ; Moose, sympathique corniaud moustachu, est chargée d’aboyer, Tui et Lucy, border collies, sont les « vrais » chiens de berger. Si Lucy accuse les années, Tui est pro jusqu’au bout des ongles : elle ne quitte pas les moutons des yeux une seconde, file à droite ou à gauche dès que l’un d’eux a une velléité de sortir du troupeau ; quand elle court, sa foulée est semblable à celle d’un guépard, aussi rapide et fluide… Boots, elle, eh bien, c’est Boots ; encore en apprentissage, et pas très futée d’après Hamish.

Vermifugeage pour chaque agneau.

Boots, Tui et Moose en pleine action.

Tewy, excellente pro.



Quant aux agneaux, il sont branchés sur des ressorts ! Lorsqu’ils s’échappent du couloir de vermifugeage, ils croient manifestement voir une barrière car ils sautent et parfois, ils terminent le saut en beauté par une ruade. Les voir sortir comme cela – zboïng, zboïng, zboïng – est réjouissant ; un dessin animé de Tex Avery  en vrai...

Et hop!

Et re-hop!



samedi 19 décembre 2015

Christchurch, une ville en renaissance

Jusqu’en février 2011, peu de gens connaissaient le nom de Christchurch, deuxième plus grande ville de Nouvelle-Zélande. Et puis, le 21 février 2011, le monde entier a découvert les images d’une ville ravagée par un tremblement de terre, causant la mort de 166 personnes et un-tiers des bâtiments du centre-ville détruits ou gravement endommagés, dont la cathédrale.

La cathédrale...

... et la vie sur son parvis


De nombreux bâtiments sont encore inutilisables.



Les habitants ont décidé de surmonter cela avec un sacré dynamisme, et j’ai adoré ma journée passée dans cette ville. Partout des chantiers sont en cours, du street art recouvre les murs qui restent des édifices démolis, les murs qui entourent la cathédrale sont décorés de dessins flashys, des projets émergent çà et là pour remplir les dents creuses avec des événements temporaires, cafés, concerts, expositions, etc… Un centre commercial réalisé avec des containers s’appelle « Re-start » (redémarrer) et fourmille de monde… Bref, ils ont choisi la vie pour tirer le meilleur de cette tragédie.



Re-start, un centre commercial réalisé avec des containers.

Re-start, toujours...

Re-start, encore...

Re-start offr aussi des oasis de paix très appréciés.

Ici se trouvait auparavant un KFC (Kentucky fried chicken).



Un des premiers lieux restaurés a été cette rue des années 30. Les couleurs ont été choisies pour redonner l'espoir aux habitants.

En plein centre de la ville, un vaste espace détruit, dont une partie a été transformée en jardin sauvage.

Les berges de la rivière Avon, en  pleine reconstruction.

Avec certaines rues aux alignements de bâtiments fermés, j’ai parfois eu l’impression de me retrouver à Detroit ; sauf que dans un cas, la ville doit se relever de cinquante ans de ruine et il n’est donc pas toujours facile de voir les choses avec optimisme, dans l’autre il s’agit de surmonter un événement dramatique mais heureusement unique. D’où ce sentiment d’énergie, de croyance en l’avenir que j’ai ressenti. Il est vrai qu’il y avait un magnifique soleil, cela aide !


Oxford au pays des kiwis


J’ai aussi découvert un autre aspect de Christchurch, celui de « la ville la plus britannique de Nouvelle-Zélande ». Dans le splendide jardin botanique, on peut faire du punting sur la rivière Avon (comme Stratford upon Avon) dans la plus pure tradition oxfordienne – les touristes asiatiques adorent ! – les édifices néogothiques du XIXe siècle abondent, des petits ponts de pierre traversent les rivières, on flâne sur Cambridge Terrace ou Oxford Terrace, on prend un thé dans l’ancien presbytère avec ses colombages, oh my dear…







De plus, j’ai pu ici revoir Denise, une ancienne collègue qui a quitté la France pour la Nouvelle-Zélande il y a sept ans ; se retrouver à discuter de l’Alsace à l’autre bout du monde est un moment assez délicieux…

vendredi 18 décembre 2015

On the road...

Juste pour le plaisir, quelques images de paysages parcourus en Nouvelle-Zélande, Wellington la petite capitale du pays, le ferry qui relie Wellington, dans l'île du nord, à Picton dans l'île du Sud, et surtout la route entre Picton et Kaikoura, sur la côte Est. Là, j'ai vu des ciels, des ciels... Des nuages d'une netteté telle qu'on a l'impression qu'on pourrait les toucher du doigt, du coton, des écharpes, des draperies, des volutes de fumée... J'aurais aimé qu'une caméra soit greffée dans mes yeux pour pouvoir en capturer chaque instant...

La gare de Wellington: des Christmas carols à l'intérieur...

Et les couleurs de Noël à l'extérieur.

Les docks sont un lieu de promenade avec cafés, boutiques, restaurants. Mais j'ai pu comprendre le surnom de Wellington "windy city"!




L'île du sud se profile devant le ferry, sauvage et déserte.


Paysage après Bleinheim, sur la route entre Picton et Kaikoura. Impressions de montagnes marocaines.

Splendeurs du ciel à chaque seconde en approchant Kaikoura.



Les phoques se prélassent au bord de Kaikoura.


lundi 14 décembre 2015

Waitomo et Rotorua, mystérieux mondes souterrains

Terre de volcans, la Nouvelle-Zélande possède un monde souterrain fascinant. A Waitomo, toujours dans l’ile du nord, j’ai visité des grottes dont la particularité est d’être habitées par des milliers de vers luisants. Les grottes étant en partie parcourues de rivières, nous les avons visitées en tubing, revêtus de combinaisons étanches.

Après un début à sec, au milieu de quelques stalactites et stalagmites, notre guide Nathalie nous a conduits à la rivière, nous avons éteint nos lampes, et là, la magie s’est présentée à nos yeux. Des myriades de petites lumières bleu-vert au-dessus de nos têtes, comme une voie lactée mouvante au fur et à mesure de notre avancée. Spontanément, nous nous sommes tous tus, comme si nous ressentions instinctivement que ce que la nature nous offrait était sacré, à respecter. Cette voie lactée bougeant sous nos yeux était fabuleusement belle… Par moments, elle s’étendait sur les parois des côtés, nous donnant l’impression que nous pouvions toucher ces étoiles du doigt. Un moment merveilleux.


J’ai découvert ensuite Rotorua, une ville que l’on sent avant de voir… Une douce odeur d’œuf pourri vous accueille en effet dans ce haut-lieu de la géothermie. Ce qui parfois crée des malentendus ! Il m’est arrivé de passer près de gens, un effluve malodorant me parvenait au nez et je me préparais à lancer un regard soupçonneux vers mon voisin quand soudain je me souvenais que, non non, ici, cette odeur est normale !

Au beau milieu de la ville, dans le parc, des lacs soufrés son à admirer.

Les anciens bains, aujourd'hui musée: délicieusement british.

Au beau milieu de la ville, dans le parc, tandis que d’un côté se trouvent les jeux pour les enfants, on se promène au milieu de sources de boue brûlante, de sources d’eau tout aussi brûlante – heureusement protégées par des barrières – d’étendues d’eau sulfurée… Je m’y suis promenée avant d’aller dans le village maori voisin – un vrai village, pas un village reconstitué – qui m’a beaucoup rappelé la réserve de Wikwemikong dans l’Ontario, où j’étais en juillet : des maisons soudain beaucoup moins opulentes que dans le reste de la ville… 

J’ai eu une passionnante discussion avec le vieux vendeur du magasin d’artisanat maori et un ami à lui, parlant de l’expérience que j’avais vécue su l’ile de Manitoulin, dans la compagnie de théâtre de Debajehmujig, les mythes indiens, leur histoire; il m’a raconté comment, lorsqu’il chasse ou pêche, il remercie les dieux anciens. Son ami, lui, m’a parlé du ressentiment qu’il a, encore et toujours, envers ce que les colons ont fait à ses ancêtres et à leur terre, et envers le gouvernement, avec lequel manifestement les relations ne sont pas toujours apaisées. J’ai été émue et je me suis sentie très honorée lorsque, au moment de se quitter, le vieux vendeur m’a dit « well, you’ve made my day ! »…

Le Polynesian spa dans le soir qui tombe, un régal! Quant à l'odeur d'oeuf un peu trop passé, eh bien, on s'y fait...



Et le soir, je me suis rendue au Polynesian spa, sources d’eau chaude directement devant le lac de Rotorua, un délice… Premier lieu de tourisme créé en Nouvelle-Zélande, Rotorua a une adorable ambiance britannique, avec ses anciens bains semblables à ces vieilles villas de bord de mer de colombages rouges, quelques vieux hôtels aux salons parés de fauteuils en cuir à l'atmosphère oh so british, my dear...

"Lady Knox geyser".

"Champagne pool".


Vert laiteux...

Cuivré...

Ou turquoise, des lacs magnifiques mais mortels. 

Le lendemain, avec deux Françaises et une Allemande rencontrées au backpackers hostel, nous sommes allées voir les deux parcs géothermiques, Wai O Tapu et Waimangu. Des lacs aux couleurs improbables, vert fluo, bleu turquoise, orange, rouge, dues aux différents métaux, sur lesquels planent des fumées insaisissables, des cavernes d’où l’air brulant sort en grondant dans des lieux nommés « grotte du diable », « caverne infernale », « lac de la poêle à frire » avec ses volutes de fumée serpentant à la surface, une vision immobile et mouvante à la fois...

J’ai été sidérée quand j’ai vu que la vallée de Waimangu, avec sa végétation et son atmosphère dignes de Jurassic Park  a à peine plus de 100 ans, elle est née en 1886, lors de l’explosion du volcan Tarawera. 17 kms de terre se sont ouverts d’un bout à l’autre, créant 22 cratères. Des scientifiques de l’époque ont pu photographier ces moments, un peu comme si l’on avait des témoignages de gens ayant connu la création du monde…